Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
partage lesbien
Archives
Derniers commentaires
7 mai 2008

Putain de gamins!

Je vais vous raconter ma journée d'hier au collège...
Bon, ça commence par 106 km, heureusement, il fait beau... et, puis bonne surprise aujourd'hui le pont de Tancarville est gratuit. Je demande : "qu'est-ce qui se passe?". Ils me répondent : "bah on est en grève parce qu'on gagne le smic, on fait les trois-huit, on travaille les dimanches et jours fériés". Je réponds : "bon courage, je suis avec vous!", et je pense à la grève que je ferai jeudi prochain.

J'arrive au collège : faut déjà commencer par séparer deux mioches qui se battent dans les couloirs et s'assènent des grands "pd", insulte suprême (si on excepte l'indétrônable : "ta mère). J'ai pas le temps de réfléchir au caractère homophobe ou misogyne du vocabulaire adolescent parce que j'ai encore le cartable et l'ordinateur dans les mains. Alors je hurle plus fort qu'eux : "Vous voulez que je vous aide?" et je lance un "ça te rendras pas plus viril d'insulter ton copain de pd". Ils restent cois, c'est le but.

Je peux enfin prendre mon café avant cette grande journée qui m'attend.
J'annonce aux sixièmes que la prof de latin va faire une intervention dans mon cours pour leur présenter l'option latin qu'ils pourront choisir pour l'an prochain.
Réactions en vrac : "c'est pourri le latin... ça sert à rien... les 4ème m'ont dit qu'on avait que des sales notes... si tu prends le latin tu commences à 8h tous les jours..." et j'en passe.
Bon, je leur explique qu'avant de se prononcer il fallait peut-être quand même être au courant de quoi on parle.

Aujourd'hui c'est la photo de classe, ça veut dire qu'il faut que tu sortes de ta classe dans les couloirs avec une bande de 25 agités (non pas 25 parce que les filles sont calmes, elles sont en train de se recoiffer). Donc, avant toute chose, tu expliques qu'on n'a pas le droit de courir, qu'on ne hurle pas dans les couloirs parce que ya des cours, qu'on n'a pas le droit de disparaître aux toilettes...
Evidemment tu te sens obligée de poser avec la bande de grumeaux qui t'a fait chier toute l'année, pour le souvenir!

On revient en classe, on corrige les exercices. Ils sont plutôt calmes et ils ont fait leur devoirs, je me sens un peu détendue : ERREUR!
Ne jamais se sentir détendue!
Parce que le petit ALvin, on ne sait pas pourquoi, alors que tout le monde prenait la correction, et ben lui il se met à hurler : "VOS GUEULES!!!!!!" de toute sa voix de gamin de 12 ans, il se met à trembler, à pleurer aussi.
Dans un premier temps je gueule aussi, mais je réfléchis vite et je me dis que c'est pas dans les habitudes du petit Alvin de faire un coup pareil. Faut réagir hyper vite : je me dis que le mieux c'est de l'isoler et de pas lui crier dessus. Je lui dis de me suivre dans le couloir : le môme il chiale, je prends donc (sur moi d'abord) ma voix la plus douce et je lui demande  ce qui se passe... ALvin il pleure et il regarde ses chaussures. Je lui dis que si il a hurlé c'est peut être parce que certains de ses camarades se sont moqués de lui : silence et larme qui coule par terre. Je lui demande si c'est parce qu'il a eu une mauvaise note? Si il a des problèmes chez lui? ALvin il dit seulement "je dirai rien, j'dirai rien". Je lui dis qu'il est sûrement malheureux et que je ne peux pas le laisser comme ça. "j'dirai rien...".
Bon, je comprends que je pourrai rien en tirer et je le confie à une surveillante en lui racontant l'incident.
Je fais vite parce que, évidemment pendant ce temps là y'en a 24 qui risquent bien de s'exciter.
Je reviens dans la classe et je demande des explications aux autres : "Qu'est-ce qu'il a Alvin?" "rien madame, il est cinglé" est la seule réponse valable que j'obtiens. "Qui l'a insulté?" "Personne madame c'est pas la première fois, une fois en anglais il a failli casser la porte, et puis c'était déjà comme ça à la primaire". J'ai du mal à y croire. "Il est cinglé qu'on vous dit madame".
ça sonne. Faut que je ramasse les affaires d'Alvin, que je lui porte parce que c'est l'heure du déjeuner. Déjà qu'on a que 50mn pour manger, qu'il faut aller jusqu'au lycée, puis faire la queue et j'ai encore 4 heures de cours qui m'attendent... je prends quand même le temps de causer à ALvin. La surveillante me dit qu'elle a rien réussi à en tirer : j'essaie encore, rien à faire...
Bon, va falloir que je convoque ses parents qui ne seront libres qu'à 19h, ou qui me poseront un lapin comme une fois sur deux... tout ça pour certainement m'entendre dire que oui il est comme ça même à la maison depuis toujours et que non ils ne verront pas de psychologue parce que il va bien.

Heureusement qu'on mange super bien à la cantine... enfin on mange trop et il te prend un petit endormissement de début d'ap juste au moment ou la sonnerie de 13 heures retentit!

Aujourd'hui Aimad a décidé de faire chier, comme hier du reste... mais là ça a l'air d'être prémédité. Je connais l'animal depuis deux ans et je sais quand ça dérape plus que d'hab, je sais aussi qu'il ne faut pas le laisser aller trop loin... Il n'écoute rien, il demande à sortir au toilettes pour la quinzième fois, ça fait quinze fois que lui dis non et que ce sera toujours non!, il parle de foot avec ses copains : il me chauffe, je lui signifie plusieurs fois que je vais le virer par la peau du cul... Et moi j'essaie de lire une nouvelle de Maupasssant mais il parle par dessus moi.
Je m'arrête, je tape sur le bureau et lui dis une dernière fois de se taire. Je l'entends qu'il murmure, mais j'entends bien quand même : "vas-y (parce qu'aucune phrase ne peut commencer autrement...), je t'ai pas parlé à toi".
Aimad a donc droit à un petit entretien privé avec moi. Je sais qu'avec lui il faut y aller cash, ne pas mâcher ses mots : "Aimad, que tu fiches rien en classe, c'est une chose, que tu me manques de respect et que tu me prennes pour une conne s'en est une autre! Je suis pas prête à laisser passer ça. Tu me connais, je suis gentille mais ya des limites à ne pas dépasser". Il baisse les bras plus vite que je ne l'imaginais, il reconnait avoir franchi les bornes des limites, s'excuse et dit qu'il va se tenir à carreau.

En 4ème, je me dis que je vais pouvoir souffler parce qu'ils ont interro : ERREUR!
Je sors le rituel : sortez une feuille! Et là quelque uns s'exclament : quoi? ya interro!
J'ai envie des répondre : "bah oui pauv larve ça fait deux jours que je le dis et qu'on révise en vue de...", mais comme ce métier m'a appris une chose essentielle : garder son calme (je crois que je suis devenue imbattable), je réponds calmement : "c'est pas de ma faute si tu dors depuis trois jours, j'avais prévenu".
Alors évidemment ya celle qu'était partie en week end prolongé et qui me sort : "j'étais pas là vendredi, je peux pas le faire". Je réponds : "ok tu fais pas la question 4 mais le reste tu peux le faire", alors elle me sort "mais j'y comprends rien moi", alors je lui dis : "toutes façons, je vois pas ce que ça change, vu que quand tu es là tu n'apprends rien et tu ne sais pas de quoi on cause". Elle acquiesce et prépare une copie sur laquelle elle passera une semi heure à écrire son nom et à décorer avec stylos de différentes couleurs (j'ai souvent remarqué que les cancres avaient plus de stylos que les autres, ça les occupe).

Après je déménage pour me rendre en salle informatique avec des sixièmes. On prépare des exposés sur la mythologie. Je sais pas si vous avez déjà essayé de faire travailler 25 gamins sur des ordinateurs, mais franchement c'est du sport!
Pour commencer, il faut s'assurer qu'ils ne vont pas tous sauter sur les postes avant d'avoir écouté les consignes, parce qu'une fois qu'ils sont devant un écran c'est mort.
Ensuite, il faut qu'ils rentrent leur identifiant pour ouvrir le poste : normalement c'est facile vu que c'est le nom, le prénom et la date de naissance. Sauf que t'en as plein qui mettent le prénom à la place du nom, d'autres qui connaissent pas le numéro de leur mois de naissance...
Et puis, bien sûr ya toujours des postes qui ne fonctionnent pas pour une raison inconnue (voire, c'est arrivé la semaine dernière, aucun ordi ne fonctionne et toi t'a rien prévu d'autre pour occuper ces chères têtes blondes). Alors tu dis à Dylan (y'en a toujours un qui s'appelle comme ça) qu'il va devoir se mettre à côté de Cindy. Mais lui il veut pas parce qu'il trouve que ça pue les filles (il changera vite d'avis dans deux ans).
Après faut te battre pour qu'ils lisent effectivement les documents qu'ils trouvent sur internet, parce que si tu surveilles pas, ils font des copier-coller à tire larigot sans même être capables de te dire de quoi ça cause.
Y'a celui qui te dit : "madame ça marche po" et clique comme un cinglé... le con il a fait beuguer l'ordi. Son voisin qui dit "moi je trouve rien, ya rien sur mon truc, ça craint" Evidemment, tête de pioche, t'as tapé "sisife" au lieu de "sisyphe". "ah bah, si même l'orthographe ça compte!..."
Pendant ce temps là t'as intérêt à bien gérer l'imprimante : tu préviens, parce qu'on te la fait plus à toi "personne n'imprime sans mon accord!", parce que les mômes, ils ont vite fait de t'imprimer un documents de 200 pages en couleurs et adieu la cartouche, et puis tu sais qu'à l'intendance, ils en ont jamais des cartouches de rechange!

Après c'est la récré. Là tu te dis elle va souffler la fille. Bah non, pas vraiment parce que la récré elle dure que 10 minutes (rapport aux cars qui viennent chercher les petits bouseux de la cambrousse), que les petits sixièmes ont filés dès le premier tintement de sonnerie laissant la moitié des ordi ouverts. Donc c'est qui qui les éteint? Et puis t'expliques vite fait au petit Kévin que tu veux voir ses parents. Mais le petit Kévin il répond que papa viendra pas parce qu'il est à l'hôpital en cure de désintox et que maman elle viendra pas non plus parce que elle a pas le permis.
Alors tu ramasses tes affaires vite fait direction la salle des profs. Tu traverses les couloirs en gueulant sur les mômes qui se bastonnent, qui crachent, qui courent... T'arrives dans la salle des profs en te disant que tu vas être peinard pendant 5 minutes mais c'est sans compter la petite Allissonne "avec 2 l, 2 s, 2n qu'elle arrête pas de dire" qui veut des photocopies de son cours pour sa copine malade qu'elle n'ira probablement pas voir parce que "faut pas abuser, c'est trop loin". Et puis ya le petit Alexandre qui te dit qu'il a oublié son blouson dans la salle informatique et puis Jessica qui demande sans dire bonjour si tu pourrais pas mettre ça dans le casier de monsieur machin... T'arrive juste à ta tasse quand ça sonne à nouveau! Fuck!

Il te reste une heure. Là, tu pourrais te dire je tiens le bon bout : ERREUR,
parce que l'heure qu'il te reste c'est LES QUATRIEME 2!!!!!!!!!!
Y'a un collègue qui te lance : bon courage, moi je viens de les avoir, ils sont chauds!
Parce que les QUATRIEME 2, même si ça fait 14 ans que t'enseignes, et ben tu t'y fais
pas, tu sais que ça peut être hiroshima en pire.
Tu te dis : facile, c'est la dernière heure, je vais leur coller une interro : ERREUR!
6 ou 7 guignols de rendent jamais de copie...
D'ailleurs ça te fait penser que t'avais mis des mots aux parents des guignols leur expliquant que leur bambin refusait tout travail et que tu n'étais pas payée pour faire de la garderie, t'avais prévenu : tu fais signer ou t'es viré! Donc, avant même de les faire entrer tu leur demandes si ils ont fait signer : evidemment Mailys a oublié : virée (une de moins).
Dans le rang, tu vois un petit sixième, tu te demandes ce qu'il fait là... Et puis tu te rappelles que tu l'as collé de 4 à 5 histoire de lui faire les pieds à ce petit fainéant. Soudain tu te demandes ce qui t'as pris de le coller avec les monstres, et puis t'as oublié de lui prévoir du travail... Tu retournes vite fait une table au fond de la salle et tu lui dis de recopier son réglement intérieur, ça lui fera pas de mal au petit fainéant.
Bon, maintenant faut s'occuper des monstres. Déjà, faut faire l'appel, tu demandes pourquoi Florian n'est pas là : il est toujours viré? (il a pris huit jours pour avoir insulté la prof d'anglais le naze) ou bien il est malade? "aucun des deux madame : regardez par la fenêtre madame". Tu te penches et là tu vois ton bon Florian, casquette vissée sur la tête, qui attend ses copains sur son vélo. Evidemment ses parents ont appelé ce matin pour dire qu'il était malade. Tu te dis que Florian il est plus calme sur un vélo qu'en classe, tu vas donc lui suggerer une carrière de cycliste! Mélanie n'est pas là non plus, normal, c'est l'apres midi, elle est partie faire des courses avec sa mère...
J'essaie tant bien que mal de leur faire comprendre la notion de point de vue dans  récit : narrateur omniscient, interne, externe... Bah oui, y'en a qui vont au lycée quand même... Je suis vite interrompue par le rire de Leïla, un rire niais, débile, de pouffe... elle s'arrête pas. J'avise la classe d'à côté : vide. Je lui dis : "leïla, suis moi", elle croit qu'elle est virée. "Non, non, pas par là". J'installe Leïla dans la salle d'à côté et je referme la porte. Je continue le cours. Quelques minutes plus tard Leïla frappe à la porte et dit : "Je m'emmerde!". Je lui réponds : "C'est le but". Je la laisse là bas toute l'heure, ça me fais des vacances.
Steve a fait signer son mot à ses parents comme quoi il fout rien à l'école. Je lui demande ce qu'ont dit ses parents : "ils m'ont puni" "ah oui, comment?" "ils m'ont dit de faire mes devois". Je me retiens de rire et j'explique à Steve que faire son travail n'est pas une punition, que c'est normal. Peine perdue, il répond "j'm'en fous demain ils m'achètent une PS3". Excédée je réplique  : "t'as raison, c'est pas toi le problème, c'est tes parents". J'arrive à expliquer comment reconnaître les différents point de vue dans un récit entre deux pets de Damien, Romane qui a sorti sa glace pour se refaire une beauté...
Ils rangent les chaises, ça sonne, ils sortent en me lançant un joyeux : "a vendredi madame!".
La tension retombe, je ferai bien un petit dodo mais il faut que je remonte dans ma bagnole qui a chauffé au soleil et que je m'enquille 106 km...
Ma femme je t'aime j'ai envie de te revoir, je veux passer du temps avec des gens normaux!!!!!!
Qui a dit que les profs étaient des fainéants?????

Publicité
Commentaires
L
Yep je te le souhaite, Kat ... mais l'essentiel n'est-il pas de retrouver son amour at home ? J'aurais fait ce que tu fais ... par amour. <br /> <br /> Now pour l'amour du job, je sais pas ... j'aime toujours autant les gamins, j'aime enseigner, ces échanges avec les ados ... par contre, tout ce qu' "on" nous demande de faire à côté m'use, toutes les preps, tous les moments où le cerveau est "pollué" par des pensées job-esques, le soir, le w-e, me bouffe ... je me dis que je n'arriverai jamais à bosser dans ces conditions jusqu'à plus de 60 ans ... je réfléchis sérieusement à une conversion.
K
Ben je bosse dans le 76, près du Havre, dans le coin ya 13 collèges classés ZEP sur 15! t'as qu'à voir!<br /> Je fais la route depuis 3 ans parce que j'ai rencontré ma chérie qu'habite à Caen... et j'ai pas assez de points pour une mut.<br /> Enfin, c'est la dernière année car je viens de changer d'académie, mais je suis pas sure d'obtenir un poste pres de chez moi ou mieux...<br /> C'est ça l'amour.<br /> Non j'ai pas songé à changer de métier car je les aime quand même bien ces mômes mais bon, faudrait pas que ce soit comme ça toute ma carrière!<br /> J'espère avoir mieux à la rentrée...<br /> Bises.
L
Bah ! C'est musclé par ici ... mais tu bosses dans quel coin ? En plus, tu te tapes une bonne centaine de kilomètres ... enlala !<br /> <br /> Et la petite Leïla qui te fait suer ... des bisous (chastes hein Bulle) pour l'oublier, celle-là ! ;)<br /> <br /> Finalement, je suis bien dans mon ptit bunker (mais des établissements comme le tien, j'en ai faits) ... dis, tu n'as jamais songé à changer de métier ? <br /> <br /> Allez profite de cette journée ensoleillée et dis-toi que les plus pénibles ne seront probablement pas là demain ...
K
merci de ton soutien, je pense à toi et j'espère que t'auras pas trop de cm
Z
eh eh, ben c'est pas moi en tout cas... toi non plus tu ne fais pas le "pont", alors? bon, ça, ça fait plaisir, de voir qu'on sera pas les seuls glandus à aller bosser... par contre, moi y'en a qqs uns qui m'ont dit qu'ils ne seront pas là pour "raisons personnelles", et je ne vais pas m'en plaindre...<br /> Bon courage, c'est bientôt la fin de l'année, allez!
partage lesbien
Publicité
Albums Photos
Publicité